La fin du nucléaire à portée de vue – Le Huffington Post – 27 avril 2015

ENERGIE – La perspective d’un rapprochement industriel entre EDF et Areva évoquée par Emmanuel Macron et Ségolène Royal se précise. L’Etat cherche à tout prix à éviter une catastrophe financière pour Areva, dont il détient 87% du capital et qui affiche des pertes record en 2014, de l’ordre de 4,8 milliards d’euros.

Cette situation est due à plusieurs facteurs mais elle est principalement liée aux difficultés de construction des deux réacteurs de troisième génération EPR, l’un devant être mis en service pour EDF à Flamanville, le second à Olkiluoto en Finlande. L’ASN (Autorité de Sureté Nucléaire) a récemment annoncé avoir découvert des failles de sécurité dans la cuve du réacteur, une pièce cruciale en matière de sureté.

Il ne s’agit pas du premier déboire rencontré sur ce chantier, mais cette fois le coup est rude et menace l’existence du projet, dont le coût a déjà triplé par rapport au devis initial. D’autant que le problème pourrait se poser également, non seulement pour l’EPR finlandais, mais également pour deux réacteurs en cours de construction en Chine. D’autres tests vont être pratiqués, mais la situation est suffisamment inquiétante pour que l’Etat soit au bord de la panique, il s’agit là de dizaines de milliers d’emplois et d’une sévère remise en cause du dogme du savoir-faire français en matière de nucléaire.

Cette mauvaise nouvelle fragilise encore un peu plus la politique énergétique de la France, celle du tout nucléaire menée depuis la fin des années 60 et qui semble plus que jamais devoir être sérieusement remise en question. Les nouveaux réacteurs ne seront pas mis en service avant plusieurs années et les anciens vieillissent, au point que l’ASN a demandé après Fukushima des remises à niveau des normes de sureté, qui vont couter très cher et qui ne permettront pourtant pas de faire durer éternellement des réacteurs construits il y a presque 50 ans et dont la durée de vie n’était prévue que pour 30.

Les tenants du “tout nucléaire”, les dirigeants de la filière presque tous issus d’X-Mines, auront de plus en plus de mal à faire valoir leurs arguments. Ce corps aussi discret que puissant considère que les énergies renouvelables ne pourront jamais représenter qu’un pourcentage marginal de la production énergétique hexagonale et prône un statu quo et une relance des investissements dans la construction de nouveaux réacteurs.

Or, l’ADEME (Association de l’Environnement et de la Maîtrise de l’énergie) a publié dans un silence embarrassé un rapport que Mediapart a opportunément diffusé. Ce document montre que la France pourrait produire dès 2050 100% de son électricité à partir de sources renouvelables, venant notamment d’éolien et de solaire. L’ADEME a certes fait une belle tentative pour minorer la portée de son travail, mais le mal est fait. L’Assemblée Nationale validera néanmoins prochainement la loi portant sur la transition énergétique, où le nucléaire représentera 50% du mix, alors qu’un saut qualitatif pouvait être effectué. Le courage politique et le volontarisme en matière d’écologie manquent encore cette fois, mais les citoyens français pourront maintenant juger, et voter, en connaissance de cause : une sortie du nucléaire est désormais possible.

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